i dug this grave i call my home (tadeusz)

1883 / 0 an naissance de tadeusz andrzej borowski à alatyr, dans la province reculée de tchouvachie, deuxième enfant d'une fratrie de trois. moins de deux ans le séparent de son aîné, la relation est quasiment gémellaire, la symbiose est évidente dès les premiers instants.
1890 / 7 ans dans une famille qui n'a jamais dénoté la moindre propension pour la cabale, le jeune tadeusz fait se répéter les miracles : petites mains tremblantes qui font s'enflammer les bûches humides dans l'âtre cendré, réparent la tasse favorite de leur grand-mère lorsqu'une course folle avec dymitr cause des dégâts, craque la branche d'un arbre pour assommer un camarade de classe qui se moquait de leurs allures débraillées...
1895-1902 / 12-19 ans koldovstoretz. l'impossible, un nouveau monde qui s'ouvre au gamin des rues grises de la russie profonde, loin des usines, des cendres et charbon. années lumières, les plus belles de sa vie qu'il se dit, entre les dons qu'il se découvre et l'émerveillement de son frère, les étés au manoir grishakov et l'amitié de syuzanna, l'impression que le monde entier est à portée de main et le sourire de maksym, le sourire de maksym. amour naissant un peu tabou, un peu défendu, tadeusz qui ne sait pas bien, un peu trop timide, maladroit, qui a les dogmes de la société non-mage encore lourds autour de la cheville.
1899 -- première violente dispute entre les frères, les chamailles toujours nombreuses mais jamais blessantes, le coeur brisé de dymitr n'épargne pas le cadet, blâme cette même magie qui roule dans ses veines. s’ils se réconcilient peu de temps après, le bref déchirement plante les graines de la discorde.
1902-1912 / 19-29 ans d’aventure en aventure, tadeusz explore le bagne terrestre, sa russie natale, si grande, si altière, même elle semble limitée face aux possibilités qui s’ouvrent à lui. il rejoint maksym et les deux hommes voyagent ensemble, l’amitié qui n’en est plus une depuis bien des années se mute enfin en ce qu’elle était toujours destinée à devenir et il se gave de bonheur, le né-moldu, c’est à peine s’il croit à sa chance.
1916 / 33 ans il ne se rappelle même plus. juste que les mots étaient violents, autant que des coups, que ça portait sur la magie et sur les règles d'un monde et de l'autre et toutes les discordances et désaccords accumulés par des années de séparation et de retrouvailles toujours trop courtes. ils s'étaient blessés. tadeusz avait claqué la porte de l'appartement de dymitr et trouvé refuge dans un bar jusqu'à sa fermeture, jusqu'à ce que la lune soit si haute dans le ciel qu'il avait eu l'impression de se tordre le cou en levant les yeux pour l'apercevoir. et un cri avait déchiré la nuit. et les griffes et les crocs avaient ravagé son visage, son torse, jusqu'à ce qu'il ne reste de lui qu'à peine la force du désespoir, juste assez pour transplaner sur le palier de maksym.
1917 / 34 ans les feux de la révolution. son bûcher funéraire. l'humanité cramée dans la fureur. il avait échappé de peu à ses assassins, son salut du à la mémoire des rues de son enfance, tous ces détours, ces recoins, ces allées devenues châteaux, barricades, cachettes, alors qu'il avait huit ans à peine et que dymitr et lui se vouaient à la grandeur de leurs imaginations. c'est son frère qu'il avait voulu retrouvé, son frère qu'il avait vu serrer la main des tueurs, un corps à leurs pieds bottés. dymitr l'avait trahi, il avait choisi un camp et tadeusz se trouvait du mauvais côté. il avait fait quelques pas en arrière, la nuit noire l'enveloppant dans ses bras cruels, funérailles solennelles dans les ténèbres de l'homme qu'il était jusque là. tadeusz borowski avait péri dans le carnage d'alatyr.
1918-1921 / 35-38 ans années d'errance, d'abord à se cacher et à ruminer sa déception, sa haine, cette rage faite matière au creux de son ventre. il se transforme, tadeusz, devient autre chose, ses membres animés par la colère. il se bat, agressif et et irascible, les mains tâchées de sang que l'animal lèche avec avidité aux soirs de pleine lune. il se planque dans les caravanes mouvantes d'un cirque moldu, jusqu'aux abords de la capitale. dans les rues de moscou il se fait remarquer, se présente sous un autre nom, construit une nouvelle identité, chien de combat dans l'illégalité, il devient par la suite membre à part entière au sein des orkhideya.
1923 / 40 ans il entend qu’on murmure ce nom d’un autre temps. s’il n’était pas venu s’accouder au comptoir du boyarski à cet instant exactement, il ne l’aurait jamais entendu, il n’aurait jamais croisé le regard si familier, miroir de celui de l’aîné. mira, improbable dans le parterre des ruffians, portrait craché de cette femme qu’il avait jusqu’alors oublié. nièce rencontrée au hasard, celle pour laquelle il ressuscite tadeusz borowski, la seule famille qu’il lui reste vraiment.